Nous avons tous été “scotchés” par la nouvelle. Le 1er constructeur automobile du monde, l’Allemand Volkswagen, a triché.
- Massivement : on parle de 11 millions de voiture concernées par cette fraude !
- Sciemment : pendant plusieurs années, Volkswagen a émis des rejets de gaz toxiques dans l’atmosphère dans des proportions bien plus importantes que celles permises par les différentes lois nationales, tout en camouflant ces rejets lors des séances de test par l’installation sur les voitures testées de logiciels de fraude caractérisés.
Comment en sommes-nous arrivés là ? Quelles sont les conséquences d’une telle fraude de retentissement mondiales et surtout quelles leçons devons en tirer pour l’avenir ?
Ne nous faisons aucune illusion : un scandale comme celui-ci a une répercussion mondiale et il affectera durablement la crédibilité de Volkswagen, mais aussi de l’ensemble de la branche professionnelle de l’automobile. Que faire après ce mensonge XXL pour restaurer les notions vitales d’autorité indépendantes et plus simplement de regagner la confiance des consommateurs ?
Pour bien comprendre les enjeux de ce désastre, il nous faut revenir aux faits.
Le 18 Septembre, l’Agence de Protection de l’Environnement des Etats-Unis a rendu publique contre Volkswagen une accusation de violation de la loi Américaine dite de « l’air propre » (Clean Air Act). Le constructeur Allemand y est accusé d’avoir volontairement construit, de 2009 à 2015, le moteur Diesel (TDI) de ses voitures de manière à ce qu’il puisse « passer à travers » les tests d’émission de gaz toxiques lors des séances en laboratoire alors même que les résultats des mêmes émissions en conditions de conduite réelle sur route sont jusqu’à 35 fois plus élevés que ceux affichés en laboratoire.
En fin de semaine, les langues ont commencé à se délier. Dimanche, le quotidien allemand Bild a affirmé que plusieurs ingénieurs de Volkswagen ont avoué avoir truqué les moteurs diesel, à partir de 2008. Le nombre de personnes concernées, leur identité et leur niveau dans la hiérarchie du groupe reste encore indéterminé. Devant les enquêteurs chargés en interne de faire la lumière sur cette affaire, certains d'entre eux ont confessé qu'il était techniquement impossible de fabriquer le moteur développé par Volkswagen en 2005, en respectant à la fois les plafonds d'émission de gaz polluants et les impératifs de coûts. Reste à instruire le degré de connaissance de cette triche par la Direction de Volkswagen qui pourrait transformer la nature même de cette crise.
Voilà pour les faits et maintenant les conséquences, énormes, de cette triche.
D’abord et avant tout, les conséquences sont sanitaires. Le Clean Air Act des Etats-Unis n’est pas tombé du ciel pour gêner les constructeurs automobiles. A ce niveau d’émission, il est estimé que cette fraude est responsable aux Etats-Unis de la mort de 12 à 106 personnes de maladies comme l’asthme et diverses maladies cardiaques. Et il ne s’agit que des Etats-Unis où le parc roulant Volkswagen est marginal. Combien de morts en Europe à cause de cette triche là où le parc installé est important ?
Les conséquences seront ensuite industrielles, financières et sociales pour Volkswagen. Le constructeur encourt une amende massive pouvant aller jusqu’à 16 milliards de dollars et les premières estimations de la facture totale de ce désastre industriel s’élèvent jusqu’à 100 milliards de dollars. A ce niveau-là, la survie du 1er constructeur mondial d’automobile est clairement en jeu avec en 1ère ligne les 600 000 personnes travaillant dans le groupe Volkswagen.
Et alors qu’on prend le vertige devant les conséquences de cette triche, il faut bien se poser la question centrale : comment en est-on arrivé là ? Et que faire pour corriger efficacement nos pratiques collectives dans ce domaine ?
Constatons d’abord que sans une poignée de lanceurs d’alerte, étudiants et universitaires organisés dans une petite ONG, la vérité n’aurait pas éclaté.
Constatons ensuite qu’elle a éclaté aux Etats-Unis et pas en Europe, pas en France pourtant beaucoup plus directement concernées. Dans l’immédiat, une enquête est nécessaire, aux niveaux français et européen, pour repérer les véhicules qui seraient équipés de logiciels espions, afin qu’ils soient rappelés. Pour cela, les tests lancés par le Ministère de l’Ecologie, dès la semaine dernière, sur des voitures prises de manière aléatoire, vont enfin dans la bonne Direction. Une procédure de test en conditions réelles (RDE), un système d’homologation fiable et indépendant, avec une autorité publique et non privée, européenne si possible, en seront les garants.
Un renforcement des normes CO2 (normes 2025) et anti-pollution, pour diminuer suffisamment les émissions de gaz à effet de serre et respecter les plafonds d’émissions de pollution est également nécessaire.
Pour conclure, il est nécessaire d’élargir notre réflexion sur cette fraude hors norme. Au final, pourquoi un groupe aussi organisé que Volkswagen a-t-il triché ? « Parce qu'il était techniquement impossible de fabriquer le moteur développé par Volkswagen en 2005, en respectant à la fois les plafonds d'émission de gaz polluants et les impératifs de coûts ». Volkswagen a préféré prendre des risques immenses plutôt que perdre des parts de marché en ne tenant pas ses impératifs de coûts.
Et bien, il faut que ce scandale mondial marque un tournant. Il faut que Volkswagen soit frappé au portefeuille et que les vrais responsables de cette affaire aillent en prison pour que toute l’industrie automobile n’envisage plus la fraude comme une option de travail à évaluer contre la perte de parts de marché.
L’argent rend fou. C’est connu depuis que le monde est monde. Il a rendu fous certains industriels. A nous de renforcer nos contrôles et nos sanctions pour faire passer la tentation de céder à cette folie.