Je reviens cette semaine sur le drame des réfugiés d’Irak et de Syrie, tellement ce drame écrase par son atrocité les autres priorités nationales.
J’ai vécu deux moments forts ces derniers jours concernant cette question : la décision collective de la majorité municipale de la Ville d’Agen d’accueillir des réfugiés et la table-ronde organisée par l’Université d’été de l’UDI en Normandie.
Il y a 10 jours, avant l’emballement médiatique créé par la terrible photo du petit Aylan échoué sur les plages turques, nous avons eu, à l’initiative de l’un des nôtres, Bernard Lusset, un débat entre élus municipaux de la majorité autour d’une question très simple : Agen, notre ville, doit-elle accueillir des réfugiés irakiens ou syriens ?
Ce débat fut d’une intensité rare car il nous renvoyait à une question simple : voulons-nous chacune ou chacun, passer du statut d’observateur effaré par la barbarie à celui d’acteur engagé, même si cet engagement doit être minime et dérisoire par rapport à l’ampleur de la tragédie ?
Cette discussion a été pour chacun d’entre nous, l’heure du choix, le moment de la décision où l’on ne peut plus s’échapper et se cacher derrière la complexité des enjeux et des questions soulevées.
A la fin de ce débat, à l’unanimité de notre groupe, nous avons décidé de saisir notre Conseil Municipal le samedi 19 septembre, pour que la position d’Agen soit publique et que toutes les sensibilités de notre assemblée municipale puissent s’exprimer avant de se prononcer sur cette question capitale.
Je présenterai donc le 19 septembre, au nom de la majorité municipale, une délibération qui décidera de l’accueil de réfugiés prioritairement en provenance d’Irak et de Syrie car c’est là que la barbarie de la guerre civile a atteint toute son horreur.
Nous le ferons sans trembler. Nous le ferons aussi de manière sérieuse en liaison avec les autorités compétentes de l’Etat, en mobilisant les initiatives associatives et personnelles de la ville (et je suis sûr qu’elles seront nombreuses) et en donnant rendez-vous au Conseil Municipal avant la fin 2015 pour une première évaluation de ce que nous aurons pu faire.
C’est mon collègue, Bernard Lusset, notre adjoint aux Finances, un de nos élus les plus expérimentés qui coordonnera nos efforts.
Comme tous les élus locaux, je crois connaitre ma ville, je sais que cette question peut choquer et diviser, mais je sais aussi que l’honneur en politique c’est de se situer sans ambigüité. Et je suis fier que notre équipe municipale ait choisi clairement le camp de l’humanité et de la générosité.
Devons-nous pour cela, parce que nous aurons choisi d’être généreux et sérieux en matière d’accueil des réfugiés, arrêter de réfléchir sur les racines et sur les causes profondes de ce drame ?
La table-ronde « Migrations, Que peut faire la France, Que devrait faire l’Europe ? » organisée par l’UDI et Hervé Morin en Normandie dimanche dernier est venue me rappeler l’ardente obligation que nous avons de réfléchir en profondeur à cette question.
Cette table-ronde réunissait Antoine SFEIR, Directeur des Cahiers d’Orient, Pierre HENRY, Directeur Général de France Terre d’Asile et Amal CHEVREAU, Directrice des Etudes de l’IPEMED.
En les écoutant, j’ai pu mesurer la légèreté de ma culture générale concernant le Moyen-Orient, comment Daesh est né à la suite de la prise en main du gouvernement irakien par la minorité chiite sous influence iranienne, comment s’était il enraciné et avait-il gagné l’appui d’une large partie de la population sunnite en Irak d’abord puis en Syrie.
Toute cette réflexion est absolument indispensable si nous voulons construire un jour une politique diplomatique et militaire digne de ce nom qui éradique Daesh de cette région du monde. J’ai mesuré aussi, en écoutant ces experts, le caractère dérisoire, j’allais presque dire pathétique, des gesticulations de notre président. Il était clair pour eux, qu’étendre les frappes aériennes contre Daesh à la Syrie ne changerait pas grand-chose.
Lors de cette table-ronde, d’autres interventions de ces trois experts ont profondément percuté mes convictions sur ce dossier capital de la maitrise des flux migratoires. Amal Chevreau a insisté sur l’urgence d’associer le Maghreb et l’Egypte au contrôle des flux migratoires. Elle a démontré, par une analyse très rigoureuse que ces pays y avaient intérêt et y étaient prêts.
Enfin, ces experts ont proposé des progrès à portée de main dans la politique européenne de maitrise de ces flux : harmonisation du droit d’asile, liste unique des pays dit « sûrs » etc ...
Et si c’était cela être citoyen aujourd’hui ? Décider d’agir, même humblement, même petitement quand on le peut. Et en même temps, ne jamais renoncer à la quête de la vérité et de la lucidité.