Le rideau est tombé sur le premier tour de la Primaire de Gauche et on en connaît maintenant les principaux enseignements.
La participation, d’abord.
Elle se situe autour des 1,6 millions de votants. Elle est respectable, mais elle est aussi en net recul par rapport à la Primaire de la gauche en 2011 (2,6 millions votants) et très en retrait de la participation au premier tour de la Primaire de la droite (4,3 millions de votants).
Bref, même s’il n’y a pas de désastre en matière d’intérêt des Français pour la sélection du candidat socialiste, déjà, à l’aune de cette seule mesure, l’essoufflement de la gauche est visible.
Les sélectionnés pour la "Finale" : Benoit Hamon et Manuel Valls, ensuite.
Benoît Hamon est le promoteur politique d’un revenu universel où l’Etat renonce à identifier celles et ceux qui ont besoin de son aide et veut abroger la loi travail accouchée au forceps du 49.3.
Manuel Valls, sur ces points capitaux, veut faire exactement l’inverse. Lui, qui avait théorisé l’existence de "gauches irréconciliables" se trouve en bien mauvaise position pour incarner le rassemblement à gauche.
Risquons-nous à un peu de prospective. L’arithmétique des soutiens électoraux (les 18 % de Montebourg se reportant majoritairement chez Hamon) et la dynamique des résultats du premier tour nous laissent à penser que le vainqueur de cette primaire sera Benoît Hamon.
Quel symbole terrible pour la Gauche que celui de faire battre un ancien Premier Ministre après avoir subi le refus du Président de la République de défendre électoralement son bilan !
Si ce choix se confirmait, il serait un signe irréfutable que les électeurs de gauche désertent en majorité la gauche de gouvernement, la gauche du réel (et ceci quelque soient les limites et les échecs du quinquennat Hollande) pour se réfugier dans la gauche du rêve et de l’utopie.
Cette histoire du revenu universel est quand même un sacré révélateur. Le revenu universel, même revu à la baisse à 600 €/ mois, coûte 300 milliards €/an. Il est parfaitement clair qu’il n’y a pas le début de la moindre chance qu’un pays aussi endetté et fiscalisé que la France le mette en œuvre. Je n’évoque même pas les ravages faits dans la nation sur la motivation à travailler par cette idée généreuse mais folle à côté desquels la géniale réforme des 35h payées 39h apparaîtra comme une toute petite plaisanterie.
Et bien, ce diagnostic simple à faire ne va sans doute pas suffire à discréditer Benoît Hamon. La gauche, à bout de souffle, déserte le réel et choisit le rêve.
A bien y réfléchir, il y a des raisons profondes à cette désertion.
En fait, la gauche est malade de n’avoir plus d’idées pour changer le monde tel qu’il est aujourd’hui: mondialisé, numérique, inégalitaire. Elle n’assume plus ou ni l’utopie européenne, ni la réalité de la construction européenne comme réponse à la brutalité de la mondialisation et elle se retrouve bien nue pour lutter contre le retour inquiétant des nationalismes. A nous centristes, de relever sans ambiguïté ce drapeau pro-Européen.
Elle est incapable de penser la révolution numérique, son fameux modèle économique reposant sur les plateformes mettant en relation clients et prestataires (Uber, AirBnb,….), ses auto-entrepreneurs et leurs start-ups. Au contraire, elle s’enfonce avec ce revenu universel dans un assistanat d’état généralisé.
Elle renonce même à faire des propositions pour augmenter les recettes de l’Etat et ainsi pouvoir avoir un Etat capable de mettre en œuvre des politiques sociales et éducatives basées sur le mérite et l’égalité des chances.
Oui, la mondialisation produit une France de plus en plus inégale que ce soit au niveau des patrimoines ou au niveau des revenus.
Quelle politique fiscale au moment où l’impôt sur les sociétés est de plus en plus vidé de sa force et de sa pertinence à cause de la mondialisation et des dumpings fiscaux qui l’accompagnent, où la rentabilité fiscale de l’ISF est contestée et où la France est médaille d’or en matière de prélèvements obligatoires ? Silence radio à gauche tout au long de la campagne des Primaires.
Quelque soit le vainqueur dimanche, il ne sera pas en état de porter l’espérance des Français.
Oui, il faut rêver, à partir de ses convictions, pour s’ouvrir de nouveaux horizons.
Oui, à titre d’exemple, je rêve que les nouvelles technologies permettent à la démocratie française d’avancer, de faire des progrès.
Mais, il faut avoir ensuite la volonté de confronter nos rêves avec la vérité et la réalité.
En 2017, cette confrontation salutaire de nos rêves légitimes et de la réalité Française ne se fera pas à gauche.
En 2017, le changement sera ailleurs, quelque soit le vainqueur de dimanche prochain.