08.04.2020

Philippe Vigier : "Le sujet majeur qui est devant nous, c'est l'état immunitaire du pays."

 

Philippe Vigier, député, docteur en pharmacie, directeur de laboratoires d'analyses médicales, a accordé une interview au journal Le Point dans laquelle "il défend une stratégie massive de tests sur la population pour accompagner le déconfinement."

 

Coronavirus : le député qui veut tester les tests

 

Une voiture blanche file sur les routes droites et désertes de la Beauce. Au volant, Philippe Vigier, le député centriste et biologiste, se rend dans l'un des cinq « centres Covid » qu'il a fait installer sur sa circonscription. Dans quelques minutes, il réalisera un prélèvement sur une jeune femme, atteinte de détresse respiratoire. C'est le quarantième dépistage qu'il réalise — gracieusement — depuis le début du confinement. Philippe Vigier fait partie de ces parlementaires qui ont décidé de renfiler la blouse blanche le temps que durera l'urgence sanitaire.

 

Le député, qui travaille dans son laboratoire d'analyses médicales tous les lundis matin se consacre en ce moment quasi exclusivement à la lutte contre le Covid-19 dans sa circonscription. Il prévoit cette semaine de réaliser d'autres prélèvements sur des malades présentant des symptômes prononcés du Covid-19. Il doit aussi livrer des bidons de gel hydroalcoolique dans des Ehpad. « La semaine dernière, on a aidé Coty Cosmetics et la Fédération nationale des transports routiers à fabriquer et livrer 21 500 litres de gel sur 143 communes », se satisfait l'élu.

 

Dans son bureau au laboratoire d'analyses médicales de Châteaudun (Eure-et-Loir), il défend une stratégie massive de tests sur la population pour accompagner le déconfinement : « Le sujet majeur qui est devant nous, c'est l'état immunitaire du pays », avance le biologiste qui s'inquiète de l'absence du manque d'information sur les tests sérologiques permettant de mesurer le degré d'immunité de la population.

 

La fiabilité des tests développés à la va-vite le préoccupe. Pour lui, rien ne serait plus grave que des tests sérologiques qui engendrent des faux positifs, « cela signifierait qu'on laisserait circuler des gens qui se croient protégés, alors qu'en fait ils risquent de propager ou contracter le virus », explique Philippe Vigier. Pour le biologiste, « la fiabilité des réactifs en cours de fabrication est fondamentale, or il est actuellement impossible de la connaître ».

 

Ce lundi, Philippe Vigier a fait parvenir au Premier ministre un courrier dans lequel il s'inquiète « des choix du gouvernement quant aux types de tests privilégiés » ainsi que de la disponibilité « d'informations parcellaires sur les travaux et la recherche en cours ». Il propose une stratégie simple et massive pour évaluer la fiabilité de ces tests développés à la hâte : une grande étude sur les 15 000 patients diagnostiqués positifs au Covid-19 et déclarés guéris. Ces derniers présentent nécessairement des anticorps et constituent un vivier idéal capable d'éclairer la fiabilité des tests sérologiques. « Avec 3 500 laboratoires d'analyses biologiques en France, on peut faire ça en moins de 24 heures », explique-t-il, inquiet de voir certains tests mis en production alors même que leur fiabilité n'est pas démontrée… « Le système de “savonnettes” génère plein de faux positifs et de faux négatifs, ça n'est pas fiable », balaie-t-il.

 

Les labos qui vont produire les millions de tests qui accompagneront le déconfinement seront-ils retenus sur des critères strictement médicaux ? « Je l'espère », lâche, un rien inquiet, le député qui avait préconisé de supprimer les agences régionales de santé dans un rapport parlementaire sur l'égal accès aux soins. L'activité à l'Assemblée nationale est aujourd'hui réduite à portion congrue, mais l'heure n'est pas (encore) à l'affrontement politique : « Vous ne m'entendrez pas dire de mal d'Olivier Véran. Ce ministre de la Santé tient la barre et fait le boulot », explique ce centriste proche d'Hervé Morin, qui formule cependant cette mise une garde : « Parler de déconfinement n'a aucun sens tant que l'on ne sait pas ce que l'on veut faire. » Pour y parvenir, il faudra des tests et des masques en quantité industrielle, le tout guidé par une ligne claire sur les comportements collectifs à adopter et les publics à maintenir à l'abri. Pour ce qui est des tests, la France serait-elle capable de prélever et analyser plusieurs dizaines de millions de personnes en quelques semaines ? « Techniquement, oui, les labos peuvent suivre. En deux mois, on peut tester la majorité de la population », explique-t-il en précisant, qu'il faudra, avant toute chose, dresser « une cartographie des laboratoires départementaux, vétérinaires, de ville ou hospitaliers qui auraient la capacité de réaliser les tests sérologiques humains ».

 

S'il est encore beaucoup trop tôt pour tirer des leçons de la crise qui aura placé la moitié de l'humanité en confinement, il en est une que le député tient pour acquise : « La capacité à produire nos médicaments nous-mêmes est un atout pour surmonter les crises de ce type. Il va falloir réarmer le pays sur le plan sanitaire », annonce-t-il. Un combat économique et industriel de taille en perspective.

 

Source : Le Point

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