06.05.2013

"Le courage politique doit reprendre ses droits" par Hervé Morin

Tribune parue dans Le Huffington Post

Elu Président de la République, François Hollande s'était fixé trois objectifs : redresser l'économie, restaurer l'Etat, réconcilier les Français. Un an après, quelle est la situation? Un chômage et des déficits au plus hauts, un gouvernement miné par les affaires et les divisions internes, un corps social fracturé comme jamais. Certes, nul ne s'attendait à des merveilles de la part de François Hollande, après une campagne présidentielle fondée sur l'esquive et le déni, mais de là à en arriver à une situation aussi catastrophique, personne ne l'aurait imaginé. Ou en tous cas pas si vite.

Une constante relie et explique selon moi cette succession d'échecs : l'indécision ; elle-même le produit d'une sidérante absence de courage politique. Les six premiers mois, cette indécision a d'abord produit de l'immobilisme. Chacun se souvient de ce Président comme tétanisé par l'ampleur de défis qu'ils faisaient mine de découvrir, comme si la crise, le chômage et les déficits étaient une surprise.

Comme souvent dans ce cas, sous la double pression de medias interloqués par l'amateurisme ambiant et d'une majorité déjà inquiète de ce qu'elle entendait sur le terrain, la frénésie a succédé à la léthargie mais cette fois dans la plus parfaite illisibilité. Une cacophonie de tous les instants s'est installée aussi bien au gouvernement que dans la majorité. Tel ministre annonce une réforme. Un autre assure déjà de son abandon. Tel ministre promeut la rigueur. Un autre réclame la relance. Tel ministre tape sur les patrons. Un autre les reçoit au même moment. Tel ministre célèbre le couple franco-allemand. Un autre lui déclare la guerre !

Le Président ne sait pas où il va : c'est une évidence que partage aujourd'hui la très grande majorité des Français. Et après avoir été tour à tour à tour étonnés puis consternés par leur nouveau Président, ils sont aujourd'hui en colère. Et comment ne pas les comprendre ?

Comment ne pas être en colère quand on vous promet qu'il n'y aura pas de hausse d'impôts en dehors des plus riches et que l'ensemble de la population est aujourd'hui matraqué par les impôts et les charges ? Comment ne pas être en colère quand on vous promet de faire reculer le chômage et qu'on voit le nombre de chômeurs augmenter de 300 000 en un an ? Comment, en effet, ne pas être en colère quand on vous promet pendant la campagne de baisser l'âge du départ en retraite et que l'on commence à vous dire que ce sera sans doute l'inverse ? Comment ne pas être en colère quand on entend le Président dire qu'il veut une République apaisée et qu'il traite par le mépris tous les mouvements de rue qui ne viennent pas de son camp ? Comment ne pas être en colère quand on entend un Président donner des leçons de moralité à la terre entière et qu'il nomme dans son gouvernement un Arsène Lupin de la fraude fiscale ? Comment ne pas être en colère quand on entend un Président louer le professionnalisme et le courage de notre armée engagée au Mali et quelques semaines plus tard décide une purge du budget de la Défense ?

Reniements, revirements, renoncements, tel est bien le nouveau triptyque de l'action présidentielle gouvernementale. Du coup, il ne manque plus aujourd'hui que l'allumette pour précipiter notre pays dans une crise sociale qui n'aura rien à envier à ce que nous avons vu en Grèce ou en Espagne.

Personne ne la souhaite et chacun aspire au contraire à une paix civile et sociale, condition de la confiance et de la croissance. Mais pour cela il faut que cette deuxième année du quinquennat devienne celle du courage et de la vérité. Il faut cesser de mentir, cesser de tergiverser et dire enfin la vérité aux Français, même si elle est difficile à entendre. Vérité sur nos comptes publics car la situation actuelle est lourde de menaces pour notre contrat social. Vérité sur notre République qui n'est ni efficace, ni exemplaire, ni éternelle. Vérité sur notre économie car les critiques à l'égard des chefs d'entreprises et de tous ceux qui créent et innovent ne sont pas acceptables et sont surtout totalement contreproductives.

Le courage politique doit reprendre ses droits sinon la colère, elle, n'attendra pas.

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