«L’idée d’un moratoire sur le financement étranger des mosquées n’a aucun sens»
Pour le sénateur UDI de l’Eure, qui a rédigé l’an dernier un rapport sur le financement des lieux de cultes, « Manuel Valls donne le sentiment de naviguer à vue par temps de brouillard».
Que pensez-vous de l'idée d'un moratoire sur le financement étranger des mosquées ?
Cela n'a aucun sens. Admettons qu'il soit décidé demain d'interdire le financement des lieux de culte par des pays étrangers, un certain nombre de coups sont partis sur lesquels on ne pourra pas revenir. Cette mesure ne peut donc viser que des projets qui n'existent pas encore sur le papier et qui, dans le meilleur des cas, ne sortiront pas avant cinq ans.
En plus, cette notion de financement étranger est très confuse. On fait un amalgame entre l'argent étranger qui vient des Etats et celui qui est apporté par certains groupes religieux. Quand c'est le Maroc qui finance, ce n'est sans doute pas la même chose que lorsqu'il s'agit de l'Arabie saoudite.
Tout cela n'est pas à la hauteur des enjeux. Manuel Valls navigue à vue par temps de brouillard. Si le Premier ministre a fait cette annonce, c'est parce qu'il se sent pris dans une situation qui le contraint toutes les semaines à trouver des idées nouvelles .
Vis-à-vis des imams, quelle doit être la responsabilité de l'Etat ?
Je ne suis pas partisan d'un financement des imams par l'Etat. Un certain nombre de règles peut leur être imposées sans avoir à en passer par là : la pratique du français pour au moins savoir ce qu'ils prêchent, la signature d'une charte qui les engage à respecter les lois de la République et ses valeurs démocratiques et peut-être une formation obligatoire dispensée en France qui les leur inculque.
Il faut aussi sanctionner les imams qui profèrent sur les réseaux sociaux des propos contraires aux règles de la République, comme le fait de remettre en cause l'égalité des sexes ou de relativiser le viol. Ce n'est évidemment pas tolérable sur le sol de la République.
Qui doit financer la formation des imams ?
Ce n'est pas à la République de le faire ou alors il faudrait que cela s'applique à tous les ministres de tous les cultes. C'est-à-dire rentrer dans un dispositif assez proche du concordat, tel qu'il s'applique en Alsace Lorraine, sortir de la loi de 1905. Ce n'est pas au contribuable français de payer la formation des imams, pas plus que celle des rabbins ou des prêtres.
En revanche, le Premier ministre, lorsqu'il parle de relancer la fondation déjà en place pour financer le fonctionnement du culte musulman, a peut-être raison d'engager la réflexion dans cette voie. Cela peut représenter une solution, mais à condition d'y faire toute la transparence nécessaire sur l'origine des financements, qu'ils viennent des Etats ou des entreprises. Pour l'heure, j'observe que cette fondation n'a reçu qu'un don, 1 million d'euros versé par Serge Dassault.
Que peuvent faire les maires ?
Les maires n'ont aucune garantie de transparence sur le financement des lieux de culte dont ils ne peuvent pas empêcher la construction. Il faut faire en sorte que les plans locaux d'urbanisme qui sont arrêtés par les municipalités puissent prévoir des zones réservées aux édifices religieux.