À l'ère des applications mobiles, des imprimantes 3D, de la robotisation et du big data, qui peut faire mine que notre société n'avance pas à grand pas vers un changement total de paradigme ? Lorsque nous remisons un par un nos téléphones fixes et nos vieux écrans près de nos archives personnelles qui mériteraient aujourd'hui d'être numérisées pour pouvoir être préservées au maximum, qui peut prétendre qu'il ne s'agit pas de la fin d'une époque ? Une nouvelle économie que certains désignent comme une nouvelle révolution industrielle se dessine sous nos yeux et nous ne mesurons pas toujours les conséquences de ces mutations sur notre quotidien. Non seulement l'économie mais aussi les mœurs, les habitudes de chacun, les modes de consommation ou de déplacement sont amenés à se métamorphoser dans la décennie qui arrive.
Nous assistons aussi à l'émergence ultra-rapide de bassins d'emploi portés par les constantes innovations technologiques et surtout par ceux qui s'en servent pour établir leur propre business. Les entrepreneurs, les chercheurs ou encore les ingénieurs construisent par leur audace une société intelligente, collaborative et responsable. Ils sont déjà les fers de lance de l'économie française à l'étranger mais rencontrent encore beaucoup d'obstacles à l'expression pleine et entière de leur génie.
En effet de nombreux conservatismes sociaux et politiques freinent l'expansion de l'économie du futur en France. L'action publique est loin d'être exemplaire lorsqu'elle s'emploie à maintenir les rapports sociaux et économiques désuets pour répondre aux revendications des forces les plus réticentes de notre société. Nous devons prendre conscience que notre pays est encore malade d'avoir pris trop tard le virage de la disparition progressive de l'industrie ou encore de n'avoir pas envisagé plus tôt le besoin urgent d'apprentis dans des secteurs aujourd'hui en rupture de ressources humaines alors qu'il existe tant de jeunes désœuvrés, sans emploi et sans diplôme. Il est plus qu'urgent de se résoudre à enfin dédogmatiser le débat sur le temps de travail, d'assouplir les charges pesant sur les salariés et leurs employeurs, ou encore de bâtir un nouveau contrat de travail véritablement inclusif. C'est le cas notamment du contrat de travail unique à droit progressif qui remplacerait les autres formes de contrat (CDD, CDI) et qui donnerait aux travailleurs plus de protections au fur et à mesure qu'ils restent dans l'entreprise. Pour les entreprises, le montant des charges est dégressif en fonction de la durée de l'emploi, ce qui permettra aux entreprises les plus vertueuses de bénéficier d'une baisse des charges. C'est aussi le cas de la durée du travail qui doit faire l'objet d'une négociation collective entre le Chef d'entreprise et les représentants du personnel ; la loi se limitant aux règles concernant la santé et la sécurité des travailleurs (normes OIT)
Aujourd'hui osons aussi appeler à un sursaut des pouvoirs publics, à un réveil de l'État qui doit pouvoir accompagner efficacement les entrepreneurs et les créateurs. Prenons quelques exemples.
En premier lieu, nous devons proposer une véritable réforme du statut d'indépendant dans son volet social, fiscal et assuranciel. Le RSI n'est aujourd'hui qu'une contrainte supplémentaire au pied de ceux qui consacrent leur vie à assurer plus de liberté et de confort à chacun, sachons leur offrir un statut à la fois souple et protecteur. Ces travailleurs souvent non-salariés ont aussi droit comme tous les autres travailleurs à une protection sociale qui leur garantisse plus de droits en cas de congés maladie ou de congés maternité. Il est aussi normal qu'ils puissent bénéficier d'une retraite avec des revenus décents.
Par ailleurs, le mode de taxation des transactions au sein de l'économie réelle ne pourra jamais se transposer mot pour mot aux transactions en ligne par manque de moyens techniques et humains. Sachons proposer à AirBNB, à UBER ou encore au Bon Coin une nouvelle manière de participer au financement de l'État sans heurter leurs modèles. Plutôt que de vouloir réglementer leur fonctionnement, accompagnons-les dans leur développement et mettons en place des moyens de contrôle pertinents pour limiter les abus provenant souvent d'une infime minorité d'utilisateurs de ces plateformes.
Enfin, mobilisons les données, mobilisons la connaissance, mobilisons les expériences de chacun pour bâtir une société de l'émulation, une société du vivre-ensemble dans l'inventivité et le partage. L'économie de demain passe par l'éclosion d'un véritable écosystème public-privé : sachons financer et inaugurer de plus en plus d'incubateurs, de hubs d'entreprises, d'espaces de co-working, de dialogues et de rencontres ; sachons ouvrir les données et les ressources numériques de l'État et ses agences pour favoriser les projets des entrepreneurs du futur, sachons aussi faire de nos universités des lieux plus performants pour le savoir et la connaissance avec une mention particulière pour l'Engineering, l'Informatique et le Management. Enfin sachons bâtir un environnement propice à l'investissement en mettant en relation entrepreneurs et financiers du privé comme du public avec une fiscalité favorable au retour progressif au plein emploi. Sur ce dernier point, la règle absolue doit être de converger vers la moyenne européenne, notamment pour la fiscalité sur le capital (IS, dividendes, plus-values de cession et suppression de l'ISF).
Notre pays a de nombreux atouts pour réussir son incursion dans cette nouvelle économie que nous intitulons aussi d!conomy ou digital économie. Si nous combinons à la fois les réformes structurelles nécessaires et une forte mobilisation en faveur de cette économie de l'innovation, notre pays redeviendra l'un des plus compétitifs en Europe avec un gouvernement qui facilite la vie des entreprises, une fiscalité combinant efficacité et incitations à la réussite et des contraintes administratives plus légères.