Pour certains, dernier rempart avant l'aliénation de nos libertés ; pour d'autres, seul frein à une lutte enfin efficace contre le terrorisme, l'Etat de droit n'en finit pas de diviser la classe politique. Le président UDI de la Région Normandie, Hervé Morin expose ses arguments.
Faut-il modifier notre Etat de droit pour lutter contre le terrorisme ?
HERVÉ MORIN. C'est une évidence. Il n'y a pas plus attentif aux libertés que moi, j'ai enseigné le droit constitutionnel. La Constitution organise la façon dont l'Etat peut exercer la violence avec efficacité, tout en protégeant les libertés fondamentales. Cet équilibre n'est plus en phase avec la réalité que nous vivons. Quand le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat assurent que la rétention n'est pas possible constitutionnellement, changeons la Constitution ! Le Premier ministre et le président de la République ont martelé que nous étions en guerre. Donnons-nous les moyens de la gagner !
N'y a-t-il pas un risque de dérives ?
Le plus grand risque de dérive serait d'aller vers un délitement de la communauté nationale. L'Etat de droit souffrirait alors bien plus. Le placement d'office en matière psychiatrique existe, pourquoi n'est-il pas possible pour les gens considérés comme dangereux ? En Israël, le drame de Saint-Etienne-du-Rouvray n'aurait pas pu se produire. Vu le pedigree de l'auteur, il aurait fait immédiatement l'objet d'une décision de rétention administrative. Décision contre laquelle il existe d'ailleurs des voies de recours en droit.
Vous en appelez à un « dispositif d'union nationale », c'est-à-dire ?
Il ne s'agit pas d'un gouvernement national, où tous les partis gouverneraient dans une recomposition politique. Je laisse cette initiative au candidat qualifié le soir du premier tour de la présidentielle face à Marine Le Pen. Il s'agit de mettre toute la représentation nationale autour de la table cet été, pour préparer une révision constitutionnelle. Si la déchéance de nationalité justifiait pour le président le rassemblement des parlementaires en Congrès, éviter que le terrorisme provoque une déconfiture le devrait également.