Dans une interview au Parisien, Hervé Morin monte au créneau sur les conditions d'organisation de la rentrée scolaire alors que les incertitudes liées au Covid-19 se multiplient. Mardi, il a adressé un courrier au ministre de l'Education nationale pour faire part de son inquiétude.
>> Pourquoi avez-vous adressé un courrier mardi au ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer ?
Hervé Morin : Tout simplement pour m'étonner de l'impréparation et des conditions chaotiques dans lesquelles va se dérouler la rentrée. Début août, j'avais exprimé mon inquiétude sur l'absence de plans alternatifs de rentrée dans l'hypothèse où il y aurait une reprise de l'épidémie de coronavirus. Je constate qu'il n'y a eu aucun travail préalable durant le mois d'août pour mettre en place de tels plans. Or, l'on voit bien que les toutes prochaines semaines s'annoncent potentiellement compliquées car le virus continue à circuler.
>> Qu'est-ce que vous appelez des « plans alternatifs » ?
Il aurait fallu donner des consignes très claires aux chefs d'établissements pour bâtir des scénarios alternatifs opérationnels avec les mairies, les départements ou les régions. Prenons des exemples : si la situation sanitaire impose des effectifs en demi-classe, il pourrait être utile de trouver, en lien avec les collectivités, des locaux pour l'autre moitié des classes et de déplacer des établissements scolaires pour permettre un enseignement à distance évitant de laisser les jeunes à la maison. Je rappelle que lors du dernier confinement, plus d'un million d'élèves ont décroché. C'est évident que pour cela, il faut des équipements, du personnel et cela ne se fait pas en 24 heures !
>> Qu'aurait-il fallu faire d'autre ?
Il aurait également été pertinent de réfléchir en amont à l'évolution des horaires d'ouverture et de fermeture des établissements scolaires pour pouvoir, si besoin, élargir les plages horaires de la restauration collective et ainsi pouvoir nourrir tout le monde. On sait par ailleurs, que la plupart des internats ne permettent pas la distanciation des élèves. Il aurait donc été là encore utile de regarder une solution d'hébergement complémentaire. Enfin, s'il faut distancer les élèves dans le transport scolaire, cela suppose toute une série d'adaptations qui ne se décrète pas du jour au lendemain. Je n'évoque pas non plus les ateliers des lycées professionnels où la distanciation est compliquée. Tout ce travail qui aurait dû être fait durant l'été n'a pas été fait.
>> Vous accusez le gouvernement d'impréparation ?
Oui bien sûr même si je comprends que les ministres soient sortis rincés de la période de la Covid. Le gouvernement a péché par optimisme. Cette rentrée scolaire n'a été préparée qu'avec l'idée qu'elle se passerait dans des conditions normales : c'est du wishful thinking, c'est-à-dire prendre ses rêves pour des réalités ! Les chefs d'établissement ont été livrés à eux-mêmes. Rendez-vous compte que les recteurs ne voient le ministre de l'Education nationale qu'aujourd'hui ! A cinq jours de la rentrée !