#Covid19 #Lycées #Collèges #ProtocoleSanitaire
Alors que le Premier Ministre a décidé de maintenir les lycées ouverts, le protocole sanitaire qui s'y applique est aujourd'hui au coeur du débat. Entretiens avec nos élus.
Invité de LCI, Hervé Morin a rappelé que les chiffres des contaminations des collégiens et lycéens avancés par le ministre de l'éducation étaient totalement «fantaisistes» (cf l'extrait ci-dessous).
Le Premier Minsitre ayant néanmoins décidé jeudi de maintenir les établissements ouverts, c'est donc le protocole sanitaire qui depuis est au cœur du débat, deux élus chargé de le mettre en œuvre nous livrent ce qu'il en est vraiment.
Entretien croisé
Arnaud Tanquerel
1er Adjoint au Maire de Bayeux Vice-Président de Bayeux Intercom en charge de l'enseignement et Président Les Centristes Calvados
Laurent Burckel
Conseiller régional Grand Est délégué aux ressources humaines et Président Les Centristes Bas-Rhin
>> Le protocole sanitaire est-il accepté et mis en œuvre dans les établissements scolaires ?
Arnaud Tanquerel : Une nouvelle fois, la communauté éducative (enseignants, et personnels de la collectivité) a montré sa capacité à s’adapter. Les deux principales mesures de ce nouveau protocole (#Confinement2), le non brassage des classes et le port du masque pour les enfants de plus de 6 ans, sont respectés. J’avais un vrai doute sur le fait que les enfants puissent supporter le masque toute une journée, mais c’est le cas !
Laurent Burckel : Globalement le protocole sanitaire est accepté par tous les élèves, le personnel a lui plus de mal à le mettre en œuvre, cela s’explique par les difficultés techniques, le rendant difficile à faire appliquer. Par exemple entre chaque service, les tables et les chaises de la salle de restauration doivent être désinfectées. Nous avons aussi vu la pertinence de certaines de nos décisions prise au début de la mandature, comme la création pour la médecine du travail d’un véritable plateau médical en interne avec 2 médecins et 9 infirmières. Nous y avons ajouté une cellule d’écoute psychologique au début de la crise, aujourd’hui ce plateau montre toute son efficacité.
>> Relevez-vous des difficultés dans ce protocole ?
Laurent Burckel : Nous avons les internats où par définition les lieux de vie et de rencontre sont plus nombreux donc cela nous demande une charge de travail supplémentaire. Le protocole est aussi aujourd’hui je trouve trop lourd, mais les problèmes ne se limitent pas à celui-ci. Les difficultés sont d’abord une somme de petits problèmes qui nous compliquent la tâche et demandent beaucoup d’énergie, notamment la question du personnel. Ainsi, dans la Région Grand Est, sur les 5400 agents dans les lycées, 500 sont en absences autorisées car considérés comme personnes à risque. Je ne compte pas dans ce chiffre les cas contacts et les Covid +, par exemple un soir à 22h la CPAM a désigné toute une brigade comme cas contact, concrètement 10 cuisiniers d’un lycée étaient absent le lendemain. Nous avons plusieurs fois évité de justesse la fermeture d’un établissement.
Il y a une autre difficulté, tous les lycéens sont équipés d’un ordinateur par l’action de la région, mais pas les professeurs dont l’équipement relève de l’Education nationale.
Arnaud Tanquerel : Pour moi, la difficulté est le port du masque. Certains enfants restent plus de 9 heures à l’école (transport, garderie, cantine, étude…) et les parents ne pensent pas toujours à donner deux masques par enfants. Je dirais même trois ! Car entre un masque qui tombe dans la cour de récréation, un élastique qui casse ou un éternuement trop fort, la gestion des masques demande à être inventif.
>> Quelles modifications souhaiteriez-vous apporter ?
Arnaud Tanquerel : Nous avons acheté un stock de masques jetables d’appoint pour répondre à ces soucis de gestion des masques. Nous allons aussi offrir deux masques lavables par enfants cette semaine. Mais une fois de plus, les collectivités sont mises à contribution, sans concertation et dans des délais très courts.
Aussi, nous avons dû avec les équipes de la restauration, organiser les repas soit en trois services quand c’est possible, ou en utilisant des espaces pédagogiques pour répondre à la problématique du non brassage des différents classes. Nous avons dû renforcer nos équipes avec des dizaines d’agents disponibles dont l’accueil a été fermé pour renforcer l’encadrement et s’assurer que le protocole soit bien en place (maitre nageur, bibliothécaire, agent des musées…).
Laurent Burckel : Comme je l’ai dit les problèmes ne reposent pas que sur le protocole, ils sont aussi administratifs et financiers. Par exemple lorsque nous recrutons en CDD, nous devons attendre entre 5 et 10 jours que le tribunal nous renvoie un extrait de casier judiciaire donc nous perdons beaucoup de temps, or nous devons faire preuve d’agilité, de souplesse et de réactivité depuis mars. Jeudi nous avons délibéré pour recourir à des vacataires mais cela créer des tensions avec les syndicats, ils y voient une forme d’ubérisation et précarisation du personnel. Il y a aussi les problèmes que cette crise comporte, il faut à la fois que la collectivité supporte les coûts de personnel supplémentaire (heures supplémentaires, embauches) et les coûts d’équipement (gels, masques, produits de nettoyage) sans compensation de l’État.
>> À la suite de l’annonce du statut quo pour les établissements scolaires décidé par le Premier Ministre, quelle est votre réaction ?
Laurent Burckel : Très honnêtement c’est très compliqué de continuer ainsi, les annonces faites par le gouvernement ne se retrouvent pas toujours ensuite dans les textes. La difficulté c’est aussi pour nous d’adapter les besoins de personnel aux 250 lycées que compte la Région, car l’hybridation présentiel/distanciel relève des proviseurs donc la collectivité doit s’adapter à la décision de chaque proviseur.
Arnaud Tanquerel : Je reste convaincu qu’il est capital que les enfants et les jeunes puissent bénéficier de l’instruction. L’école est un vrai lien social, d’apprentissage et d’ouverture. Pour autant, il était évident que pour les lycéens le protocole ne pouvait être respecté. Le distantiel était incontournable.
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