14.02.2016

"Chômage, la vérité en quelques chiffres" par Philippe Vigier

Tribune parue dans le Huffington Post

"Ce n'est pas à un moment où il y a un taux de chômage élevé qu'il faut réduire les droits des chômeurs", clamait François Hollande il y a tout juste deux ans. Aujourd'hui, alors que les organisations syndicales s'apprêtent à renégocier la convention d'assurance chômage, sa ministre du travail assure que "la question de la dégressivité mérite d'être étudiée".

On passerait volontiers outre les incohérences gouvernementales si le chômage n'était pas un drame touchant plus de six millions de Français.
Toutes catégories confondues, le nombre de demandeurs d'emploi s'élève en effet à 6 510 300. Un chiffre bien éloigné des trois millions et demi affichés par le gouvernement, devenu maître dans l'art de manipuler l'opinion en excluant les catégories B, C, D, E et l'outre mer.

En témoignent les annonces récentes sur le soutien à l'apprentissage, à la formation professionnelle ou à l'entreprenariat - atouts longtemps ignorés par la majorité - qui font craindre une tentative de faire diminuer artificiellement les chiffres, en sortant les demandeurs d'emploi des relevés mensuels du chômage.

Depuis que le chef de l'Etat considère que l'emploi est "la seule question qui vaille" - et surtout depuis qu'il a promis qu'il ne briguerait pas de second mandat sans baisse crédible du chômage - il se montre très pressant envers les partenaires sociaux. 

Quitte à ressortir une vieille mesure, qui n'avait pas démontré son efficacité sur le retour à l'emploi entre 1992 et 2001. Ainsi donc, le gouvernement envisage de diminuer les droits des chômeurs...dont il est lui-même responsable !

Derrière les chiffres du chômage que la ministre du travail commente chaque mois avec optimisme, il y a des vies brisées, des familles qui explosent, des personnes qui perdent leur maison parce qu'elles ne peuvent plus rembourser un crédit, il y a toute une France qu'on laisse s'enfoncer dans la détresse et la précarité.

Au lieu de passer le plus clair de son temps à promettre des inversions de la courbe du chômage, le gouvernement gagnerait à s'inspirer de ses homologues européens, ou tout simplement à écouter les économistes.

Alors qu'en France il faut avoir cotisé 4 mois sur 28 pour être éligible à l'assurance chômage, la moyenne européenne est trois fois supérieure. Par ailleurs dans notre pays, la durée d'indemnisation maximale est de 2 ans, là où elle n'est que d'un an en Allemagne et de 6 mois au Royaume-Uni.

Les théories économiques sur l'efficacité de l'assurance chômage ne manquent pas. Un bon système doit fournir une protection suffisante tout en responsabilisant les acteurs, inciter à retrouver un emploi tout en permettant un fonctionnement optimal du marché du travail, et assurer l'équilibre du régime sans qu'il soit besoin de recourir à la dette.

Qu'attend-on pour réagir ? La durée d'indemnisation doit passer de 24 à 12 mois, sans dégressivité. Par ailleurs, toute la politique de la formation professionnelle et de l'insertion des demandeurs d'emploi doit passer aux mains des régions, pour fonctionner bassin d'emploi par bassin d'emploi. Le gouvernement a une fois de plus perdu une occasion d'agir : la prochaine réforme du travail devra être décisive.

Encore faut-il abandonner ce petit jeu de cache-cache et accepter de recentrer le service public de l'emploi sur ses priorités : garantir la performance de l'assurance chômage et donner un emploi à tous les sacrifiés du quinquennat. 

Partager :  

Autres Actualités

20/12/2024
Communiqué de presse vendredi 20 décembre 2024   En responsabilité, Les Centristes s’engagent en faveur du gouvernement en souhaitant que leurs priorités soient respectées   Hervé MORIN, Président des Centristes, a participé hier à la réunion organisée à Matignon à l'invitation du Premier ministre...
07/12/2024
331 voix.   Mercredi 4 décembre, en fin de journée, 331 députés ont voté en faveur de la motion de censure contre le gouvernement de Michel BARNIER.   Trois mois seulement après sa nomination, le Premier ministre Michel BARNIER a été contraint de quitter ses fonctions, laissant en suspens de...
11/09/2024
"Il faut rétablir l'efficacité de l'action publique. La dépense publique ne doit pas répondre à tout ! Surtout quand on est déjà dans le pays avec la dépense publique la plus élevée ! Il faut enfin faire confiance. Il faut permettre l'adaptation des lois, une régionalisation sur l'agriculture, l'...