18.07.2016

"Nice : le deuil, le débat et la guerre" par Jean Dionis

Ce qui s’est passé à Nice est atroce, d’une sauvagerie sans nom et d’un cynisme insupportable.

Mais après les attentats de Charlie Hebdo en janvier, ceux du Bataclan en novembre, ceux de Magnanville, nous n’avons plus le droit d’être naïfs et surpris.

Pour ma part, je suis choqué par la cruauté des actes. Mais, je ne suis surpris ni par le mode opératoire, maintes fois éprouvé dans les rues de Bagdad ou de Kaboul ni par le fait que la France soit en première ligne de cette sale  guerre qu’il nous faut livrer et gagner contre l’islamisme  radical.

Pas surpris et permettez-moi de vous proposer une relecture de ce que j’écrivais en janvier  2015, et qui n’a malheureusement pas pris une ride:

« La France est en guerre avec le terrorisme et plus spécialement avec le terrorisme islamiste. Le mot "guerre" est encore discuté dans les médias à propos des événements de ces derniers jours. Mais, cette dure réalité s’imposera. Resituons ces événements dans la longue durée. La France est intervenue ou intervient depuis deux ans, en Libye, au Mali, en Irak et en Syrie. A chaque fois, nous le faisons – et nous avons raison, à mon avis, de le faire - avec notre armée, nos troupes d’élite contre différents groupes terroristes islamistes (Al Quaïda, DAECH, etc...). Cela porte un nom. Cela s’appelle faire la guerre. Et, la conséquence première de cette situation est qu’il faut se préparer à subir là où cela fait mal, c'est-à-dire sur notre territoire national, la réponse armée et sanglante de nos ennemis. Or le peuple français, à l’occasion de ces événements, découvre que cet ennemi-là dispose de la capacité de nous frapper en France, à Paris, au cœur de la nation.

Et s’il le peut, ce n’est pas seulement qu’il dispose de bases d’entraînement, de financements importants à l’étranger, mais aussi et surtout parce qu’il peut s’appuyer sur des citoyens français en nombre relativement important – Mohamed Merah, les frères Kouachi, Coulibaly sont tous des citoyens français – pour en final perpétrer ces crimes. Soyons clairs. Une telle situation, par sa durée sur plusieurs années, par les forces humaines et matérielles considérables engagées aussi bien par la France que par ses ennemis, mérite qu’on ne fasse pas sur son compte de déni de réalité …..

Cette guerre risque de durer longtemps. Aucune des raisons qui l’ont amenée – intégrisme anti-occidental dans les pays arabes et en France, rôle et responsabilités de la France en Afrique Occidentale, etc... – ne va s’évanouir et disparaître rapidement. Pensons juste un instant aux treize années de guerre menée avec des moyens considérables en Afghanistan par les Etats-Unis et à la situation très fragile, avec les Talibans aux portes du pouvoir, laissée par ces mêmes américains au moment de leur départ de ce pays. »

Plus personne, aujourd’hui, ne conteste ce diagnostic qui avait fait débat et polémique en janvier 2015. Manuel Valls a raison et est dans son rôle de Premier Ministre lorsqu’il prévient que « d’autres vies vont être fauchées et qu’il va falloir apprendre à vivre pendant longtemps avec le terrorisme ».

Mais puisque cela va durer, alors il convient de se mettre d’accord  sur quelques vérités essentielles malmenées à l’occasion de l’attentat de Nice.

Le deuil, d’abord. Les victimes de Nice ne sont pas encore inhumées. Le Président de la République a proclamé un deuil national de trois jours, avec une minute de silence national aujourd’hui à midi. Reconnaissons que nous n’avons pas su contenir notre peine et notre colère, cette fois-ci, contrairement à ce qui s’était passé pour Charlie et le Bataclan. S’il doit y avoir d’autres attentats, je crois que la nation réunie doit se promettre que les prochaines fois, elle se taira et se réunira autour des victimes pendant la période de deuil décidée conjointement par le Président de la République et les familles de victimes.  Ce sera le signe d’une nation forte et unie, dû aux victimes, mais aussi un signal fort adressé aussi  à nos ennemis.

Le débat, quant à lui, est légitime, mais après le deuil. Soyons clairs : en démocratie, le débat est légitime, même en temps de guerre. Clemenceau, tout Père de la Nation qu’il était, débattait et polémiquait sur la conduite de la guerre avec ses collègues députés devant l’assemblée Nationale de 1917 à 1918. Les questions posées sur le dispositif policier le soir du drame et plus largement sur ce qui a été fait et ce qui n’a pas été fait (centres de déradicalisation, surveillance des personnes fichées « S », fermeture des mosquées salafistes, etc…) depuis les premiers attentats contre Charlie en Janvier 2015, sont toutes légitimes et ceux qui poussent des cris de vierge effarouchée devant ces questionnements sont soit des hypocrites, soit des gens qui ne sont pas à leur place dans ce débat forcément âpre.

Mais le débat, pour être fécond, devra accepter d’être éclairé par la raison et notamment par les résultats objectifs des enquêtes disponibles.

Certaines personnes ont sombré hier pour ne pas avoir accepté cette discipline intellectuelle. Je pense à Henri Guaino et son tweet sur le lance-roquettes qui aurait empêché le drame de jeudi soir.

Reste l’essentiel : la guerre.  Tout le monde a compris maintenant qu’il y avait une guerre extérieure au Moyen-Orient et une guerre intérieure sur le sol Français. Et bien entendu, il faut se donner les moyens militaires de gagner les deux. Mais, j’entends encore trop peu de monde dire que cette guerre sera aussi politique et idéologique.

Il  faudra pour retrouver la paix inventer des équilibres nouveaux au Moyen-Orient, en Irak, en Syrie en intégrant des faits majeurs nouveaux comme le retour de l’Iran comme puissance régionale, l’émergence de la nation Kurde, etc…

Il faudra, sur un plan plus théologique, que l’Islam, par l’action de femmes et d’hommes de paix, de courage  et de progrès, fasse son aggiornamento  et notamment clarifie une fois pour toute son rapport à la guerre, sainte ou pas sainte…

Travaux d’hercule ? Peut-être, Utopie ? Certainement pas… Les rêveurs sont une fois pour toutes ceux qui pensent que l’on règle militairement et définitivement des problèmes politiques et religieux majeurs.

Oui, ce conflit d’un genre nouveau va durer.  Nous allons devoir faire preuve de résilience et d’espérance.

L’islamisme radical est un nihilisme qui n’offre aucun avenir, à personne. Nous devons porter la certitude tranquille qu’il va être balayé. 

 

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