15.12.2010

Discours de Charles de Courson à l’occasion de la discussion des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2011

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

 Au moment d’examiner le projet de loi de finances pour 2011 tel qu’il est issu des discussions de la commission mixte paritaire, il convient de tenir un discours de vérité. La situation de nos comptes publics n’est pas bonne. Il convient à ce titre de « tirer la sonnette d’alarme » si nous souhaitons ne pas terminer comme la Grèce par exemple. La question est simple : sommes-nous en mesure de respecter à ce jour le programme de stabilité que nous avons transmis aux autorités européennes ? En effet, cette trajectoire pluriannuelle de finances publiques prévoit un déficit budgétaire de l’ordre de 6% et une dette publique de 86,1% pour l’année 2011.
 Plus que jamais, et j’en profite pour vous le redire Monsieur le Ministre, notre groupe soutient sans relâche l'effort budgétaire pourvu que les principes d’équité et de justice sociale ne soient pas battus en brèche.
 Je centrerai mon propos sur plusieurs points importants.
1) Concernant les grands équilibres du PLF pour 2011 :
 Du côté des dépenses, la vérité est la suivante : nous dérapons d’à peu près 1 %. Il est indispensable, mes chers collègues, d’agir sur les dépenses, et de le faire de façon volontaire. In fine, la réduction de la dépense ne dépasse pas, à vrai dire, 14 milliards d’euros, si l’on exclut les mesures de réduction liées à l’extinction du plan de relance, qui ne sont que des économies de constatation.
Concernant les recettes, force est de constater une évolution spontanée des recettes fiscales – 12 milliards d’euros –, c’est-à-dire l’effet de retour à la croissance. Par rapport à la prévision pour 2010, le déficit diminue de 60 milliards d’euros ; ce qui est, en apparence considérable. Or, il s’agit pour près de 80 % de la non-reconduction de mesures exceptionnelles.
Comme nous n’avons cessé de le dire, sans une politique volontariste de réduction de la dépense – en fait de moindre croissance de la dépense – plus rapide que celle proposée par le Gouvernement, notre pays n'atteindra jamais les objectifs de la loi de programmation pluriannuelle.
De plus, alors que 50 % des économies dues aux réductions d’effectifs devaient être recyclées en primes destinées aux fonctionnaires, le taux réel pour 2010 sera de 73 %. Je vous en prie, revenons à la règle stricte du « 1 sur 2 ». Il est clair que nous ne pouvons pas tenir une masse salariale constante si nous ne prenons pas des mesures beaucoup plus dures que celles que nous avons adoptées jusqu’à présent. Il faudra probablement poser sans tabou la question des primes aux fonctionnaires.
Je ferai quelques remarques sur la nouvelle nomenclature de ce PLF. En effet, la règle retenue pour l’indexation des dépenses de l’Etat sur la période 2011-2014 est celle d’un gel en valeur des dépenses de l’Etat, y compris les concours aux collectivités territoriales et à l’UE, mais hors pensions des agents publics et hors intérêts de la dette. C’est la règle du « zéro valeur restreint ».
N’ayons pas peur de dire que cette règle sera moins contraignante que la règle du zéro volume élargi en vigueur depuis plusieurs années et qui consiste à stabiliser en volume la totalité des dépenses de l’Etat.
En effet, malgré cette règle, avec des dépenses globales de l’ordre de 370 milliards d’euros et une inflation à 1,5%, l’augmentation des dépenses est de l’ordre de 1,2%. Le présent budget ne retient donc qu’une diminution de 0,3% des dépenses de l’Etat au regard du changement de règle d’indexation.
Nous nous réjouissons cependant du gel en valeur des dotations aux collectivités territoriales, car c’est l’ensemble des administrations publiques qui doivent participer à l’effort de réduction de nos déficits : l’Etat et ses opérateurs, la Sécurité sociale et les collectivités.
Néanmoins, cet effort ne doit pas se faire au détriment du renforcement des mécanismes de péréquation, ni au détriment de l’autonomie fiscale des collectivités.
2) Concernant le rabot sur les niches fiscales et sociales du PLF pour 2011 :
Sur ce point, le Gouvernement a choisi d’opérer une réduction minime d’une poignée de niches fiscales, à tel point que le rabot que nous attendions s’est transformé en lime à ongles, pour reprendre l’expression du rapporteur général.
Au Nouveau Centre, nous avons toujours plaidé pour une réduction de l’ensemble des dispositifs fiscaux dérogatoires, y compris les ceux relatifs à l’impôt sur les sociétés, qui sont les « parents pauvres » de ce projet de loi.
Dans une logique de limitation des effets d’optimisation des dispositifs fiscaux dérogatoires nous avons déposé des amendements pour une meilleure utilisation du crédit impôt recherche.
J’ajoute que, parmi les 10 milliards d’euros de réduction de niches fiscales et sociales présentées dans ce budget, nombre d’entre elles ne sont ni pérennes, ni socialement justes.
Rappelons ici que parmi les 3 mesures de taxation des assurances, une seulement est pérenne, celle relative à la taxation des complémentaires santé. Les deux autres, c’est-à-dire la taxation « au fil de l’eau » des contrats multi-supports et l’application de la taxe sur les conventions d’assurance à la réserve de capitalisation, ne le sont pas.
En outre, il faut ici mettre un terme au double langage du Gouvernement qui, d’un côté s’ingénie à dire qu’il n’augmente pas les impôts et qui, de l’autre, accroît le taux de prélèvements obligatoires qui reviendra, en 2012, à son niveau de 2007 alors que le Président de la République lui-même avait indiqué vouloir diminuer ce taux de 4 points durant son quinquennat. Oui le taux de prélèvements obligatoire augmentera d’un point en 2011, c’est un fait !
3) Enfin, qu’il me soit permis de rappeler ici les attentes et la mobilisation de notre groupe politique quant à l’indispensable refonte de la fiscalité que nous demandons depuis un peu plus de trois ans maintenant.
Pour notre groupe, en effet, le bouclier fiscal n’est qu’une mauvaise solution apportée à un mauvais impôt qui ne réduit pas les inégalités et qui n’a que des effets pervers dont le premier est l’évasion fiscale. Tant qu’il y aura un ISF, nous serons condamnés, comme la gauche, à maintenir un mécanisme de plafonnement.
Le groupe Nouveau Centre a eu le courage de poser le problème de fond, et de proposer des solutions qui, je le rappelle, consistent, en contrepartie de l’abrogation du bouclier et de l’ISF, à créer une nouvelle tranche pour la fraction supérieure à 100 000 euros par part, et à augmenter les prélèvements sur les revenus du patrimoine, que nous avons – gauche comprise – abusivement abaissés.

En conclusion,
Je souhaiterais vous adresser un message clair Monsieur le Ministre : écoutez les parlementaires ! Mieux, ne dissuadez pas la poignée de parlementaires qui travaillent encore dans cet hémicycle. Nous gardons tous un amer souvenir du vote intervenu en seconde délibération le 17 novembre dernier. 
Sous ces réserves, le groupe Nouveau Centre, conscient de l’ampleur des efforts à accomplir,

Je vous remercie.

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